Le principe des articles de "pourquoi j'écris": un extrait de texte en italiques, un commentaire personnel ensuite, des liens (en bleu quand ils n'ont pas été utilisés, en gris ensuite) - et la couverture du livre, quand il s'agit d'un livre (le cas le plus fréquent), ou une illustration.
A la base: l'éclectisme, revendiqué.
Du moment qu'il s'agit d'écriture - de préférence de manière métaphorique, voire subliminale...
Associés à cette chronique, deux blogs annexes: "blogorrhée", pour pouvoir parler en sortant du cadre - éventuellement; et "mes textes", au cas où. On y accède par la bande horizontale du haut (même page) ou par le sommaire, à droite (nouvelle page).
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jeudi 2 juin 2011

Partir loin sans voir devant

La nuit, avec ses sombreros et sa douceur de suie, est prête partout mais tu ne peux, dormeur, la prendre en mille endroits. Je t'aiderai. J'ai délivré pour toi les espaces vierges dans la nuit. Cours plus vite que le coureur professionnel. Ne ralentis pas. Tu es ma grave expérience. Prends-toi par le bras. Epouse-toi au fond d'un ventre de ténèbres, solitaire. J'admirerai tes épousailles singulières. Tu récolteras à la fin de la nuit la perle fine de l'aurore. Cours pour rien. Deviens le prophète de l'ombre et du silence. Tends les mains. Mendie tout en ne mendiant rien. Tu recevras l'aumône qui pèse moins qu'une plume: la rencontre de la nuit et de ta main. Partir loin sans voir devant. Itinéraire des explorateurs et des savants. Ne dors plus, dépiaute-toi scaphandrier allongé. Remonte dormeur. Habille-toi en homme. Jette-toi dans la nuit du dehors. Il y a une forêt funèbre devant ta porte. Plonge. Tu n'auras plus pitié des aveugles et des sourds. Si tu traverses la nuit d'un bout à l'autre, baiseur téméraire de ténèbres, tu retiendras que: le fruit qui tombe est un fruit triste, les tours d'une cathédrale fermée à clé sont des hosannahs, le chêne palpite sans ses oiseaux, les barrières et les clôtures ne valent pas une allégorie, le chant du rossignol de nuit fait pâlir les verdures, sur le pont le danger prend la forme de l'anneau, l'horloge qui a sonné douze coups est ensuite une capitve enchaînée, la longueur et la largeur sont des mesures mortes, le bruit est la conclusion d'un poème terminé (la chute d'une pomme de pin sur le sable), l'autre bruit est le début d'un poème à continuer (l'entreprise du vent dans le feuillage des acacias), près du mourant il n'y a que des voyeurs....  


Au premier degré, la nuit et l'écrivain.... mais...la nuit ne peut-elle pas être vue ici comme une très belle métaphore de l'écriture...?  
Dans Je hais les dormeurs, Violette Leduc réinvente l'insomnie, s'adressant à tous ceux qui, aveugles et absents, la laissent seule, elle dont Catherine Viollet dit, dans la postface du merveilleux petit ouvrage publié par Les éditions du Chemin de fer et illustré par Béatrice Cussol, qu'elle est une exploratrice de la solitude, elle à qui sa propre mère n'a jamais donné la main... 
Curieuse lecture, dont l'éditeur nous dit qu'elle relève plus ou moins de l'expérimentation. Entre fantasme et obsessions, prose et poésie, ces pages autobiographiques sont pleine de métaphores multidimensionnelles, auxquelles on peut donner toutes sortes de significations - mais qui ramènent toujours à l'écriture.
Quant aux petits livres produits par les éditions du chemin de fer, ouvrages à deux voix, fondés sur une rencontre inédite entre un auteur et un illustrateur, ils sont beaux à faire rêver - de jour comme de nuit! - tant les lecteurs que les écrivants... L'exploration du site fait apparaître qu'on peut se procurer des exemplaires édités en tirage limité - une idée de cadeau à retenir... 

1 commentaire:

  1. J'ai tout de suite reconnu la couverture. Alors, j'ai cherché : près de mon lit, sur les étagères, dans ma mémoire. Rien, nulle part. La bonne nouvelle, c'est que j'ai offert ce livre. La moins bonne, c'est que je ne l'ai plus ...
    Alors merci GAlm. Je garde ces quelques mots :

    Epouse-toi au fond d'un ventre de ténèbres, solitaire.
    Partir loin sans voir devant. Itinéraire des explorateurs et des savants.
    Violette Leduc
    Il n'est pas nécessaire d'aller vite, le tout est de ne pas s'arrêter.
    
Confucius

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Ecrire, pourquoi pas? Et si vous commenciez par écrire ici...? Vous pouvez dire ce que vous pensez du livre si vous l'avez lu, ou bien de l'extrait cité... C'est à vous!

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